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crevette domestique
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28 mars 2007

Do you speak bureau ?

N'écoutez pas ces gens qui vous disent que pour trouver un emploi, il faut d'abord étudier, apprendre plein de choses fort utiles qui ne vous serviront que dans un petit vingt pour cent de votre vie buralistique.

Ne pensez pas non plus qu'il s'agisse d'une affaire de présentation. Les bureaux sont remplis de salariés à la peau ravagée, des boutonneux, des avinés, des pus de la gueule qui ne risquent pourtant pas de perdre leur emploi alors que d'autres font des efforts énormes pour de piètres résultats.

Il n'existe en fait qu'une méthode pour maximiser votre potentiel embauche et rentabiliser votre capital sympathie auprès de votre futur employeur. Il faut posséder son langage, maîtriser les codes utilisés par des millions de salariés et donner ainsi l'illusion que vous connaissez déjà le monde que vous souhaitez intégrer .

Avant d'être fluent en langage d'entreprise, voici quelques exemples de ce qu'il faut dire ou non pour convaincre votre interlocuteur de vous faire une place au sein de son équipe.

Cas 1

Voici mot pour mot ce qu'il ne faut pas dire :

"J'ai beaucoup voyagé. Grâce à mon expérience, je suis devenu bilingue ce qui pourrait être très utile pour votre service. J'ai en effet appris que vous alliez créer une branche internationale. Je serais très heureux d'y participer"

N'en jetez plus,  votre interlocuteur s'ennuie, son regard vous fuit, il s'étire et retient même un baillement. Vous respirez l'étudiant fraîchement sorti de l'école, le jeune loup aux dents longues qui ferait presque pipi partout pour bien marquer son territoire. Vous avez des points de vue sur tout, on ne vous fera jamais douter. Bref, vous êtes chiant.

Alors, à la place, dite plutôt

"Pour me définir, je dirais que je suis plutôt worldwide. "

Observez la différence. Un seul mot permet à votre employeur d'ouvrir grand les yeux, d'imaginer un monde sans frontières où vous serez à l'aise partout, d'entrevoir des profits en euros, en dollars, en roupies. N'en dites pas plus. Dites juste combien.

Cas 2

Ne dîtes jamais

"Sur mon CV, j'ai mis mon numéro de téléphone. Vous pensez me rappeler dans combien de temps ?"

Les expressions comme "me rappeler/ me répondre/ me recontacter" sont tellement XXe siècle que vous risquez d'attendre longtemps derrière votre Minitel avant de recevoir la moindre réponse. On ne répond plus, on ne rappelle pas, on ne contacte même plus mais on revient vers vous, terme plus générique qui englobe toutes les technologies et permet, par omission, de faire croire que vous êtes un maître du réseau, joignable n'importe où, n'importe quand, n'importe comment.
Et pas à un de ces blaireaux qui envoie encore des faxs.

Et c'est déjà ça d'économiser
sur les formations.

Cas 3

Maintenant, imaginons que votre potentiel employeur fasse quelques remarques sur votre cv, émette quelques réserves sur la pertinence de vos expériences sur votre futur métier.

Ne dîtes pas "Non mais en fait, je sais comment ça peut être utile".

Dîtes " J'entends bien. Mais... " avant de développer quelques arguments bien sentis préparés à l'avance. Il ne faut jamais donner tort à son interlocuteur sous peine de voir sa porte se fermer immédiatement.

Au contraire, louez la justesse de son raisonnement avant de démonter point par point son argumentation pour faire valoir votre point de vue qui, bien que complètement opposé au sien, n'est pourtant pas si différent.

Manière de montrer que vous apporterez votre part au débat, en restant dans la droite ligne de ceux qui vous ont embauché.

Cas 4
Vous êtes maintenant à l'essai dans l'entreprise et vous souhaitez faire connaissance avec vos petits camarades. Pour cela, profiter de la pause du midi.

De ce fait, ne dîtes pas "'Tain, j'ai la dalle, moi" ou "Fais faim, non ?" et encore moins "Y a quoi pour manger dans le coin" sous peine de vous retrouver seul avec Le Parisien du jour tous les midis.

Dîtes plutôt "T'as un dèj ?'" qui suppose simplement que vous souhaitez sympathiser avec vos aimables camarades sachant qu'ils ont un poste à haute responsabilité et donc peut être pas tout le temps à consacrer à ce genre de récréation mais que ça vous ferait plaisir à vous petit vermisseau d'apprendre des grands sages qu'ils sont. Soyez sûr qu'ils accepteront.

Cas 5
ça y est,  vous êtes embauché , vous participez à la frénésie ambiante qui fait que tout est soit urgent, soit en retard. Vos responsables vous mettent la pression et attendent de vous que vous fassiez de même auprès de vos collaborateurs.

Alors pour être entendu, ne dîtes pas "On va en mettre un grand coup" ou "c'est assez urgent, si ça te dérange pas, c'est plutôt pressé".

Dîtes plutôt : "Il me le faut pour hier" ou "je le veux ASAP" (prononcer "à Zap") qui donneront tout de suite l'impulsion nécessaire pour voir les autres se bouger le train. ASAP
("Eille aisse eille pi" pour les non-anglophiles)  étant la contraction d'As Soon As Possible qui signifie "Dés que possible", expression moins worlwide et donc moins puissante.

Voilà, il est l'heure pour moi de reprendre une activité professionnelle, n'hésitez pas à revenir vers moi si vous connaissez d'autres expressions.


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Commentaires
R
La Crevette Domest"inc" est heureuse de participer à l'essor d'un nouveau document qui optimisera certainement les outils de communications de nos managers autant qu'il permettra une analyse de perception ainsi qu'un enrichissement des méthodes pour qui souhaite avoir un plan d'action pour intégrer une équipe, jeune, dynamique et polyvalente.<br /> <br /> Maintenant, ce blog n'étant pas une page de pub, et qu'en plus, on ne m'a rien demandé, j'hésite à laisser ce commentaire...<br /> <br /> Bon, je le laisse pour aujourd"hui. Demain est un autre jour.<br /> <br /> Camarade.
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R
"Brèves de couloir" est à la fois une analyse et une méthode pour maitriser parfaitement le langage professionnel et ainsi gravir rapidement les échelons du succès (voire du "success").<br /> Retrouvez les "Brèves de couloir" et leur humour souvent involontaire sur http://brevesdecouloir.fr
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R
Quel monde formidable et étrange que l'entreprise... dialecte à part, codes, signes et symboles à respecter... tel un Levi-Strauss de l'ère numérique, tu auras su me donner, cher Ranx, les quelques clés me permettant de comprendre les structures d'un monde méconnu, moi pauvre petit aventurier pétri d'illusion.<br /> <br /> Continu sur ta lancée, c'est jusqu'içi mon post préféré de crevette domestique
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K
Bah ouai quoi, on me l'a fait plein de fois le coup de "je reviens vers vous dès que possible", ça fait un peu "cheap", isn't it?<br /> <br /> Bien cordialement, a bon entendeur, bonne réception, et tutti quanti!
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