Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
crevette domestique
crevette domestique
Derniers commentaires
Archives
12 mai 2010

Un peu loose dans la prairie...

01323790_photo_la_petite_maison_dans_la_prairie

Aujourd'hui, c'est la fête. La vraie. La grande. La -plus jamais comme avant- fête.

Pas dans le sens où il y aura des gens pour danser sur un dance-floor déchaîné tout en sautant habillé dans une piscine californienne.

Non.

Seulement, c'est mon anniversaire.

Et je compte bien le fêter dignement.

Et cela, en plusieurs étapes. 

- D'abord aller dans l'agence immobilière qui me promet le studio de mes rêves avec les fiches de salaire de mon père qui me servent de caution.

- Acheter un PowerPc Macintosh surpuissant avec tout un tas de logiciels dont le fameux Word 94 fournit avec ses dizaines de disquettes

- Retrouver ma copine du moment pour une soirée de paix-amour et sexe dans tous les sens jusqu'au bout de la nuit parce que quand même, 21 ans, ça se fête, bordel !

Mais d'abord, il serait bon que le trafic se fluidifie parce qu'au rythme où ça avance, je vais être en retard à mon rendez vous. Très en retard même.

Je n'aime pas être en retard.

Enfin, je le suis tout le temps mais là...

Si je veux cet appart, je dois faire bonne impression.

Putain, ça roule pas. On est bloqués. C'est la fin du monde. Plus personne n'avance et j'ai une heure de retard dans la tronche. Si seulement, j'avais une télécarte, j'appellerais d'une cabine. Mais non. Pas le moindre tabac dans le coin. Rien.

J'ai battu un record. Une heure et demi de retard.

- Je suis désolé, c'est le trafic

- Hm, bougonne t'elle

Pas grave, je suis là, ce désagrément sera vite oublié. Je  tends mon dossier qu'elle parcourt d'un œil.

- Je comprends pas. Il habite où votre père ?

La semaine dernière, il dormait chez une copine. Le mois dernier, on lui prêtait un studio. Et encore hier, il était chez des amis. Mais sur les fiches, normalement...

- Non parce que son adresse change sur les trois bulletins...

Je prends le temps d'assimiler avant de sourire bêtement comme s'il s'agissait d'une bonne blague.

- C'est... c'est parce qu'il bouge beaucoup.

Elle me lance son regard de celle à qui on ne la fait pas.

- Je suis désolée. ça ne suffit pas.

Bon... Je n'ai pas eu l'appartement. Tant pis. Après tout, il est peut être pas bien. De toute façon, je n'ai pas aimé cette femme. Si c'est elle mon syndic, merci, je préfère aller voir ailleurs, trouver des gens moins regardant.

En attendant, ma journée ne peut être gâchée. Je pars chercher mon PowerPC avec écran couleur.

Grâce à lui, je serais scénariste un jour.

Ou romancier.

Ou les deux.

Ou je sais pas quoi, mais un métier qui sonne bien et qui fait intelligent.

Je passe à la boutique, je charge le tout et rentre à la maison. Je branche et...

Je comprends pas...

Je relis la notice, je vérifie les cartons, je cherche par terre au cas où et pourtant non, c'est sûr maintenant...

Y a un truc qui manque.

Quelque chose comme une prise.

Résultat, j'ai le choix.

Soit j'allume le disque dur qui fait un joli BLING de guitare au démarrage, soit j'allume l'écran qui m'indique que rien n'est branché.

Mais les deux, non.

Pas possible.

J'appelle le magasin. Ils sont désolés pour moi mais c'est trop tard pour aujourd'hui. Et demain, c'est fermé. Mais la semaine prochaine, si je veux, je peux venir chercher ce qui manque.

Je bous doucement.

Trafic de merde.

Fiches de salaire de merde.

Ordinateur de merde.

Anniversaire de... non. J'ai de la ressource. En plus, ce soir, on oublie tout et on se la donne.

Allez, je m''habille, je me fais beau.

J'ai rendez-vous avec ma copine qui m'a promis une surprise.

Je sens que ça va être chaud.

Elle doit être en train de s'apprêter.

Elle aussi à plein d'idées.

Elle se fait belle pour moi

Elle est en doudoune et elle pue

- Je suis désolée, je suis pas repassé par chez moi. Pas le temps, pas l'envie, mais on s'en fout, non ?

.... Mouais...

- Et la surprise ?

- J'ai deux places pour un spectacle de magie sur une péniche. Joyeux anniversaire !

Elle m'embrasse. Je suis aussi heureux que si on m'avait offert mon poids en oies mortes.

- On y va ? ça commence bientôt.

J'espère que la magie va me changer les idées. ça commence par un tour de cartes, bientôt suivi par un foulard dans la manche qui oh, devient plusieurs foulards et ça ne finit jamais, il y en a de toutes les couleurs et un lapin sort du chapeau et un journal se transforme en bouquet de fleurs et l'assistante quinquagénaire nous demande d'applaudir bien fort, nous les dix personnes qui tentons d'oublier que ça tangue méchamment à chaque fois qu'un bateau mouche passe.

Et puis bon, ce n'est pas qu'on a vu ces tours milles fois... neuf-cent peut-être... sans oublier la tête du lapin qui dépasse du double fond...

M'enfin, c'est pas grave, c'est l'attention qui compte, après on ira chez elle et on se la...

- Si on allait manger, j'ai faim, moi...

- On a qu'à aller chez toi et...

- Non non non. Pas chez moi, y a rien chez moi et c'est moche. On a qu'à aller ici.

Ici c'est une sandwicherie où nous sommes entourés d'américains en K-way. En grignotant notre thon crudité du soir, elle me parle de ses ex., de comment c'était mieux avant, même s'ils l'ont jeté comme une merde, mais qu'elle ne leur en veut pas parce qu'elle comprend, et puis au fond elle aime bien et c'est ce qui la gêne un peu chez moi, je suis trop gentil, pas assez... enfin bref... la magie, le restau tout ça, c'est surtout pour dire

C'est fini.

J'avale difficilement ma tranche de pain de mie.

Je pourrais dire "ce n'est pas du tout ce qui était prévu" mais est-ce encore utile ?

- Tu m'en veux pas, hein ?

Je n'ai pas su me contenir. Je l'ai copieusement insulté devant nos joyeux touristes qui tentaient de traduire en anglais.

Après un court au revoir, nous nous sommes séparés bons ennemis.

Plus de métro.

Je vais prendre un taxi.

Il faudrait que je tire de l'argent.

Si seulement, j'avais une carte.

Au pire, j'ai mon chéquier.

Pour aller en banlieue, ça devrait le faire .

Y a bien un taxi qui voudra.

....

Trois heures de marche plus tard, j'arrive enfin chez moi.

La journée est finie. Mon anniversaire aussi. Je ne veux plus jamais en entendre parler.

En attendant, j'ai besoin d'un verre. J'ai besoin de me confier.

Je n'ai qu'un numéro. Celui d'une amie qui m'a dit de l'appeler dans les moments de détresse. Même si c'est la nuit.

C'était il y a quelques mois mais là...

Tant pis, j'essaye...

- Hmmm ?

- Je te réveille ?

- Hmmouui...

- Je suis désolé, j'avais besoin de discuter.

- Mj'tavais dit, pas de problème. Qu'est-ce qui se passe ?

La morale de tout cela, si morale il y a, c'est qu'après avoir tout perdu, j'ai  au moins gagné une amie.   
   

Publicité
Commentaires
R
Le tout c'est de se dire "ah ah ah, qu'est ce qu'il est con celui-là, dommage que ce soit moi" ou "dans dix ans, on en rigolera". comme ça fait plus de dix ans, j'en rigoles encore :)
Répondre
B
hahaha ! (oups pardon c'est sorti tout seul.) (On m'a pourtant appris que c'est pas bien de rire des malheurs des autres.)<br /> <br /> Comment tu fais pour rester drôle tout en étant aussi touchant !?!
Répondre
Publicité