Un tour gratuit

- Ben, dis donc...

J'entre dans le duplex. L'ensemble a un côté douillet,  on se croirait dans une demeure anglaise du début du siècle.  Deux fauteuils, pas très grands entourent une table basse en fer forgé,  le mini bar ressemble à un feu de cheminée, d'immenses tentures couvrent les fenêtres. La salle de bain est si grande qu'on pourrait y faire de l'écho. Et la chambre se trouve au bout d'un escalier en colimaçon. La grande classe.

Je défait mes affaires, On frappe à la porte.

- T'es prêt ?

Pas tout à fait mais ce n'est pas grave, il est l'heure d'y aller. Je ferme la porte. Le rangement attendra la fin du dîner.

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Il était bon, ce vin.

Bon comme un bonbon.

Bon comme le bon pain.

Je rigole bêtement à ma blague.

Elle n'est pas bonne mais quand je peux me faire rire...

J'ai l'air niais quand même...

N'empêche, je suis pas saoul.

Un peu rond mais pas saoul.

Comme cet escalier.

Il n'est pas saoul mais il est rond.

Comme moi.

Allez, brossons les dents.

Brosse à dent, brosse à dent, dans ma valise.

Dans ma valise, là-haut.

Je monte.

Je tourne.

Et j'arrive.

Brosse à dent, te voilà.

Allons-y ma belle.

On descend.

On tourne.

On arrive.

Une haleine bien fraîche, voilà.

Et maintenant, tee-shirt pour la nuit.

Tee-shirt, en haut.

Je monte.

Je tourne.

Tee-shirt, te voilà.

J'allume la télé.

Ce n'est pas dans ma langue. Je ne comprends rien mais ce n'est pas grave.

Je comprends un peu.

Je me couche, je zappe, je tombe sur les infos.

Visiblement, la terre tourne.

Et pendant ce temps, ma tête tourne.

A ce rythme là, je vais m'endormir.

Faut que je pense au réveil.

Faut que je prenne mon portable.

Mon portable dans ma veste.

Ma veste sur le mini fauteuil.

Le mini fauteuil qui est en bas.

Je soupire. Je me lève.  Je descend.

Je tourne.

Je sens que je tourne. 

Même quand je ne tourne plus.

Je cherche mon portable. 

Poche de gauche.

Je monte.

Je tourne.

Je m'affale sur mon lit.

Plus moyen de marcher.

J'ai le malaise du derviche.

Dernier réflexe, je met le réveil.

Mes yeux tournent.

Je me mets au lit.

Tout tourne.

Ne reste plus qu'à éteindre les lumières, arrêter la télévision et bonne nuit les petits.

Je vise l'interrupteur à côté du lit, extinction des lumières, c'est parti. C'est...

La télé.

Plus d'image.

Je viens de couper l'électricité.

Mais pas la lumière.

Dernier instant de courage, je me redresse.

Lumière, lumière où es tu ?

Je cherche sur le mur, pas de lumière.

Sous le lit, pas de lumière.

Derrière le lit.

Rien.

L'interrupteur est en bas.

Pas le choix, il faut que je me redresse.

Que je descende.

Que je tourne.

Je m'approche de l'escalier et là, je me sens mal.

Je m'accroche à la barre, je tourne comme je peux, j'arrive en bas, j'ouvre la porte.

Qu'est ce que je fais là ?

Je suis fatigué, je veux dormir, pas rester dans le couloir.

J'ouvre la porte. La lumière est éteinte.

J'allume.

J'entends du bruit. Je reconnais ces affaires, ce ne sont pas les miennes.

- Y a quelqu'un ?

- Non non, y a personne...

Je ferme la porte.

Evidemment, je suis à coté.

Je retourne chez moi.

Je claque la porte.

Vu le bruit, impossible de ne pas savoir.

Tant pis après tout. Ce n'est pas moi, c'est l'escalier.

L'escalier.

Mon lit.

Allez.

Je monte. Je tourne. Je... lumière.

Je redescends, je tourne. Bouton. Lumière. Et voilà.

Voilà. Je ne vois plus rien.

Je tends les mains, rien devant moi.

Impossible de monter, je rallume.

Il y a une lampe en haut.

Pas le choix.

Je monte. Je tourne. J'allume.

Je m'approche du vide.

C'est haut. Trop haut.

Le mieux, c'est de m'asseoir.

Descendre sur les fesses.

Le fer c'est froid.

Mais au moins pas de risques.

Je tourne, je m'accroche, je tourne encore.

ça fait un peu mal mais c'est amusant.

Allez, un tour gratuit.

Finalement, on rigole bien.

Dommage qu'on soit déjà arrivé.

Maintenant, faut que je me relève.

Que j'aille éteindre.

Mais avant tout, je fais une pose devant la cheminée.

Je l'ouvre pour voir.

Il est frais ce feu. Et plein de boissons.

Si seulement, j'avais des chaussettes.

J'en ai.

En haut.

Un coup d'oeil à l'escalier.

J'en peux plus.

Je pourrais jamais remonter.

Mieux vaut que je dorme d'abord.

Dans ce mini-fauteuil.

Fermez les yeux un instant, prendre une couverture.

Y en a une belle sur la fenêtre.

Je tire d'un coup, la barre vient avec.

Tout le monde me voit mais tant pis, j'ai bien chaud.
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- Alors, bien dormi ?

- Comme un bébé !

Comme un bébé qu'on aurait plâtré jusqu'au cou mais je refuse de le dire.

- T'as pas entendu de bruit cette nuit ?

- Du bruit ? Quel genre de bruit ?

- Comme de l'écho. J'ai l'impression qu'y en a  un con qui s'est amusé en pleine nuit.

- Non non enfin je me souviens plus...

- Et la  lumière ? Pas de soucis ?

- Non pourquoi ?

- L'interrupteur est en bas, comme la chambre est en haut...

- Ah ah, j'avais même pas remarqué.

Je ne parlerais que sous la torture... 

Comments

[Ranx]

Je suis sûr qu'en fermant les yeux, tu pourrais voir la situation.

En même temps, c'est peu pratique pour lire.

[Kat]

Oh la la, je viens de me bidonner comme une tordue... Comme si j'y étais....