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crevette domestique
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27 mars 2007

Cauchemar en famille

- Moi, les bicots, d't'façon, c'est simp'.

Connait-on vraiment quelqu'un avant de connaître sa famille ?

- J'aurais le droit, je prendrais le fusil là et je peux te dire que ça ferait un joli carton...

Est ce que les parents peuvent réussir leur rôle de tue-l'amour quand on a seize ans ?

- Une belle brochette que je me f'rais... Pareil avec les parigots !

Oui.

Elle et moi avions vécu une histoire d'amour trépidante, enflammée, passionnelle qui n'a malheureusement duré que le temps d'un trajet de nuit en train couchette. La faute aux vacances trop courtes et à la timidité qui a duré tout le temps de nos vacances. Nous habitions trop loin pour nous voir souvent. Pourtant, nous avions fait la promesse de ne pas nous quitter, de vivre ensemble toujours toujours... En attendant, nous nous écrivions souvent. C'était beau. C'était romantique.

Jusqu'au jour où j'ai pris mon billet pour la rejoindre.  Et que j'ai découvert ses parents.

- C'est toi le parigot ? ça fait dix minutes qu'on attend... Fais chier, merde...

Première dan d'agent d'ambiance. 

Elle a tenté de sourire. Moi aussi. Son père m'a jeté un regard assassin dans le rétro. Pour le baiser, on attendra.

J'ai découvert sa mère, une femme charmante habillée en léopard, maquillée comme une voiture volée. Elle faisait largement plus jeune que sa fille la nuit dans la brume dans une rue sans lumière. Elle souriait pour deux tandis que le père nous observait derrière sa moustache, se retenant de ne pas aller chercher le fusil.

C'est peut-être en découvrant le lit de camp posé près de la chambre des parents que j'ai compris qu'il y avait une certaine méfiance à mon égard. J'ai cru entendre le vieux grommeler un "Va pas violer ma fille ou je te tue".

Comme un message de bienvenue.

J'ai donc fait une croix sur mon week-end qui s'est mal déroulé, la mère, souriant de toutes ses rides, ne nous lâchait jamais tandis que le père nous surveillait du coin de l'oeil. Il adorait tripoter sa chienne, "la seule qui me dégoute pas" tout en parlant du porno qu'il pourrait voir ce soir tranquille.

Une chouette ambiance familiale.

J'essayais de faire abstraction de ses parents, de me souvenir de ma copine avant eux, juste histoire de ne pas la gêner. Elle semblait très mal à l'aise mais je  n'arrivais pas à  savoir si c'était à cause  de ses parents ou de moi simplement. Toujours est il que si notre amour devait survivre, ce serait  de manière épistolaire, rien de plus.

J'aurais peut être pu m'en suffire. Malheureusement, dés le lendemain, je faisais connaissance avec un autre membre de sa famille, un cousin à l'air propret, une vraie tête de fayot endimanché.

- ça y est, c'est passé dans le journal, annonça t'il fièrement au père qui s'en gratta les couilles de bonheur.

- Qu'est ce qui est passé ? demandais je, histoire de faire patienter avant l'arrivée du train qui me ramènerait chez moi.

- Je peux lui dire ?

Le père haussa les épaules, manière de donner son accord.

- On a réussi à placer une affiche de Le Pen à la télé pendant la météo régionale.

Ce grand benêt en faisait dans son pantalon de joie.   

- Et après ?

- Ben euh, c'est une manière de le soutenir. C'est qu'on l'aime bien, nous dans le coin.

Le père savourait mon expression de dégoût.

- Moi les bicots de toute façon...

Ma copine évitait maintenant de croiser mon regard. Son cousin pris un malin plaisir de m'expliquer que LePen était un type sympa avec des idées raisonnables tout à fait applicables et que même, on pouvait être "de couleur" et voter pour lui et que ce serait une bonne chose contre les étrangers délinquants gauchistes qui avaient besoin d'un rien de discipline -"d'un bon gros plomb dans le cul, oui", rajouta le père - pour retrouver les vrais valeurs de la vraie France qui les rendait si fiers.

J'essayais d'argumenter, moins pour les convaincre que pour faire passer le temps. La gare était en effet assez loin et je n'avais aucun repère dans cette ville minière. Si j'avais voulu fuir maintenant, j'aurais raté mon train ce qui aurait été assez con au final. Bien entendu, tout ce que je pu dire fut retenu contre moi.

Parce qu'à Paris, c'est pas comme ici. Qu'on est que des bourgeois qui mériteraient d'être pendus par les couilles. Parce qu'on a pas tout ces gens (je passe les expressions vulgaires) qui font rien qu'à tout saloper et à terroriser les femmes qui peuvent plus se balader tranquille, parce qu'il faudrait une bonne guerre et quelques Charters pour nettoyer tout ça.

Dernier regard vers mon ex- copine. Je voulais encore croire qu'elle ne croyait pas à tout ça. Je n'ai jamais eu la réponse.

Quand l'heure fut venu de me ramener à la gare, j'essayais d'avoir avec elle un début d'explication. Mais après un baiser furtif, elle me laissa sur le quai. De toute façon, elle ne pouvait pas rester, son père klaxonnant pour qu'elle se grouille les miches.

Deux semaines plus tard, je reçu une lettre de séparation. Elle n'avait pas du tout apprécié mon attitude. Je n'ai même pas eu le coeur de lui répondre...

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Commentaires
R
Quoi de mieux pour se réconcilier avec la misanthropie qu'une bonne grosse famille de beaufs racistes ? <br /> Tu m'avais déjà raconté cette anecdote, mais elle me fait toujours autant rire. <br /> Il serait également bon de s'intérroger sur les raisons profondes qui font que nous, pauvres petits parigots, sommes détestés par la quasi-totalité de la France... Je me suis toujours étonné de me prendre des réflexions dans les dents dès lors que je met les pieds hors du périph'... Encore un mystère de notre cher héxagone...
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B
D'ailleurs, le Papa vient de rappeler.<br /> Il te propose une réconcialition.<br /> Viens seul, demain, à 02h30, quai n°15. Histoire de briser la glace, ramène un sac de ciment à prise rapide et une bassine.<br /> <br /> Tu vois ?<br /> Tout s'arrange !
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